Sciences sociales
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On crédite volontiers Montchrestien d’avoir inventé en français l’expression "économie politique". On le classe quelque part entre Garnier et Corneille, parmi les poètes tragiques, ou entre Bodin et Colbert, parmi les mercantilistes. Il vaut pourtant la peine qu’on revienne à ses écrits. Le Traicté de l’œconomie politique, publié ici intégralement pour la première fois depuis 1615, ouvrage en prose semée de vers, riche en citations antiques et en anecdotes contemporaines, n’a rien d’un ouvrage technique ou abstrait. Paru à l’occasion des Etats généraux, il est un miroir des Princes destiné à l’institution du jeune Louis XIII. Il proclame que l’économie, loin d’être affaire d’intendants, est un élément essentiel de "la science royale de gouverner". Il soutient que la richesse d’une nation tient moins à son stock d’or ou de marchandises qu’à ce qu’on appelle de nos jours ses ressources humaines, que les rivalités internationales doivent se régler moins par des guerres, que par le peuplement de colonies, le contrôle des communications et l’avance technologique. Wébérien sans le savoir, Montchrestien fait de l’esprit d’entreprise la manifestation d’une éthique religieuse. Pour ce poète baroque, l’ardeur au travail et la quête du profit sont les colonnades qui supportent le temple de la charité chrétienne.
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